Recension de livres


2030 – La guerre de retour !

Par le général de corps d’armée (2s) Dominique Delort,
Préface de l’amiral (2s) Patrick Hébrard

Editions Le Sémaphore – septembre 2022

Cette œuvre de fiction politico-militaire, préfacée par le vice-amiral d’escadre Patrick Hébrard, nous plonge au cœur du pire des scénarios pour l’Europe. Comment faire face à l’agression de voisins très puissants et garder sa liberté, son autonomie, son territoire et ses valeurs ? Le général Dominique Delort nous place en 2030, l’Europe a récemment fait le choix d’une défense commune dans une Europe qui est devenue fédérale. Les Américains se sont repliés largement sur eux-mêmes et le Pacifique, et retirés de l’Orient, de l’Afrique et même de l’OTAN. La Chine a pris le contrôle de Taiwan en 2027.
L’Europe doit faire face simultanément à trois situations d’agression (simultanées mais non coordonnées) sur des théâtres d’opérations très éloignés (et réalistes). L’un en mer Égée, où la Turquie cherche à prendre le contrôle d’îles grecques toutes proches de ses côtes, le second en Afrique, au Sahel où l’expansionnisme djihadiste continue de se développer et le troisième en Nouvelle-Calédonie où la Chine cherche à accéder à des ressources situées dans une île divisée entre indépendantistes et partisans du maintien dans la France et l’Europe. Le scénario correspond à trois types de conflits. Le premier se “rapproche d’un combat classique avec des risques de dérapages importants et un limiteur de puissance de chaque côté pour donner le temps aux diplomates de proposer quelque chose aux politiques”, le second est “une guerre asymétrique dont les limites sont connues, avec des moyens militaires qui sont du côté de l’Europe mais pour laquelle l’affrontement des volontés reste essentielle” et le troisième est “un incident naval très grave entre deux puissances nucléaires, avec la volonté forte chez les deux partis de rester sous le seuil nucléaire pour éviter une montée aux extrêmes”.
Ce récit réaliste, à hauteur d’homme, est alerte et tient le lecteur en haleine tout au long du livre. On y voit s’affronter à distance les Côme, Lee, Modu, Brahim, avec pour chacun la volonté, le devoir et la description des sentiments qui les animent au cours des évènements qui s’enchainent. C’est aussi la description d’une organisation militaire dans cette Europe fédérale – organisation qui peut déjà exister à l’échelle d’un pays (par ex. la France) -, constituée d’un Haut État-major européen de commandement (CHEME) en relation avec les politiques de la structure fédérale (Président de l’Europe, Ministre européen des affaires étrangères, Parlement européen, …), avec les diplomates et avec le Centre opérationnel de l’armée européenne (COA). C’est dans ce COA où les chefs militaires, en grande responsabilité, planifient et coordonnent toutes les actions des unités engagées sur les terrains d’opérations. On y devine la planification et l’anticipation des actions avant le conflit, mais on voit aussi ce qu’est le brouillard de la guerre, la gestion des situations réelles, urgentes, indécises et politiquement sensibles. Car il est essentiel de garder son sang-froid et d’éviter les escalades extrêmes. “Keep calm and carry” disait Churchill. “Chacun à son poste, pour remplir sa mission sans états d’âme” dit l’auteur.
Ce livre est l’éloge des “serviteurs, civils et militaires, petits et grands, qui sont à l’œuvre, qui dans l’affrontement combattent, par idéal, par conviction mais aussi pour la plupart par esprit d’une discipline choisie et acceptée”, y compris la mort.
C’est aussi le constat que “aucun pays européen ne peut prétendre être autonome et le fait d’appartenir à une Union permet d’atteindre une taille critique pour réduire ses vulnérabilités”. Et finalement, l’auteur nous dit qu’il faut savoir choisir entre “Liberté et Autonomie” ou bien “Humiliation et peut-être Soumission”.
2030 – La guerre de retour !, par le général de corps d’armée (2s) Dominique Delort, Préface du vice-amiral d’escadre (2s) Patrick Hébrard, Ed. Le Sémaphore, Septembre 2022 – 24€


Intuition et rationalité
Leur symbiose chez l’humain et la machine

Par Claude Roche et Gérard Sabah

Éditions Les impliqués – Janvier 2023

Cet ouvrage de Claude Roche (membre du Bureau d’EuroDéfense-France) et de Gérard Sabah rappelle la définition rigoureuse de l’intelligence artificielle, sans relation avec le cortex humain, dont on ne sait pas comment il fonctionne. Il souligne l’importance de la collaboration fine et intime entre l’intuition et le raisonnement, qui est à la fois le fondement de la pensée humaine et le moteur de nos futures machines intelligentes. Il en déduit comment il faudra en tenir compte chez ces machines qui montreront certaines approximations. De très nombreux exemples d’applications concrètes présentent en appui, outre l’état de l’art, quelques pistes suggérant comment faire avancer au mieux nos systèmes et l’IA elle-même. 
Car, pour créer un système autonome, s’il existe un modèle rationnel complet, il s’agit de programmation ; s’il n’existe pas de modèle pour une ou plusieurs fonctions du système, il faut de l’IA. Et pour la développer, il faut utiliser la méthode « essai et erreur » jusqu’à obtenir une solution acceptable pour l’utilisateur. C’est même le mode de fonctionnement interne de l’apprentissage profond ; en conséquence, un système avec de l’IA montre toujours, sauf de très rares exceptions un taux d’erreur significatif – l’apprentissage profond aussi ; on aura alors créé de l’intuition artificielle à ces endroits. Dans le cas rare où il ne montre pas d’erreurs pour certaines fonctions, on aura obtenu la représentation de nouveaux concepts ou de nouvelles théories, qui peuvent alors être utilisés ultérieurement par la programmation.  
La méthode « essai et erreur » se retrouve partout : le « hasard et la nécessité » créant les molécules organiques, la création des êtres vivants, l’évolution de Darwin, le développement des sociétés, la science et l’invention des théories, les développements des systèmes (reconnaissance des empreintes digitales, développement de l’aviation, des moteurs, des automobiles, …), la construction des systèmes informatiques, l’IA elle-même, la situation actuelle du monde où toutes les organisations à tous niveaux font de plus en plus d’« essais » et donc d’« erreurs » multipliant les problèmes.
Est-ce qu’il s’agit d’une logique cohérente de l’Univers, quand il se met à se développer aux endroits qu’on peut alors appeler points singuliers, comme les trous noirs qui font l’inverse ? On peut aussi remarquer que les périodes décrites précédemment montrent une accélération assez vertigineuse, évoquant maintenant peut-être une future explosion.


Le géant empêtré 
la Russie et le monde de la fin de l’URSS à l’invasion de l’Ukraine 

par

Anne de Tinguy

Éditions Perrin, Septembre 2022

Note de lecture de Robert Korb, membre d’EuroDéfense-France

Du début de l’année 2022, chacun se souvient de l’entretien d’Emmanuel Macron avec Vladimir Poutine, assis, l’un en face de l’autre, mais éloignés par l’immense table blanche de six mètres de long, au sein du Kremlin, image ayant fait le tour du monde, le premier tendant de convaincre le second de maintenir des relations amicales, notamment avec l’Union européenne, dans le respect du droit international. Pour comprendre comment le Président de la Fédération de Russie a décidé de débuter son opération dite spéciale, le 24 février, en Ukraine, certes faisant suite à l’annexion de la Crimée et l’intervention dans le Donbass en 2014, la lecture de l’ouvrage passionnant, de près de cinq cents pages, sans équivalent sur un sujet brûlant « Le géant empêtré ; la Russie et le monde de la fin de l’URSS à l’invasion de l’Ukraine » de Mme Anne de Tinguy, professeur des universités émérite à l’INALCO (Institut Nationale des Langues et Civilisations Orientales) et chercheuse au CERI (Centre de recherches internationales) de Sciences Po, est éclairant. Il permet de mesurer combien cette initiative est « une tragédie pour l’Ukraine, un séisme pour l’Europe, un point de bascule » pour la Russie. Fruit d’une réflexion de l’auteure avec nombre d’éminents interlocuteurs, dont certains sont russes, ce livre apporte des réponses à nombre de questions : comment l’URSS, puis la Russie, sont sorties de l’emprise communiste sous les présidences successives de Mikhaïl Gorbatchev, nommé secrétaire général du PCUS en 1985, Président de l’URSS en 1990, puis de Boris Eltsine, premier Président russe élu au suffrage universel en 1991, réélu en 1996 et démissionnant fin 1999 ; qu’en est-il de Vladimir Poutine, Premier ministre en 1999, élu Président en 2000, au pouvoir pratiquement sans discontinuité, qui n’a pas donné la priorité au développement économique qui aurait doté la Russie des vrais leviers d’influence dans le monde moderne, ce choix faisant qu’elle n’a que l’apparence d’une grande puissance, son PIB nominal restant voisin de celui de l’Espagne ?

On s’interroge sans cesse : pourquoi les politiques gorbatchévienne et eltsinienne sont mises à l’écart. Avec Gorbatchev, pour la première fois depuis la création de l’URSS, le Kremlin se penche sur deux problématiques, « la modernisation du pays et la réconciliation avec l’Occident », ce qui permet de mettre fin à la guerre froide et de développer avec les pays occidentaux une « coopération constructive ». Cette perestroïka[1], une « révolution sans coups de feu » se solde par l’effondrement de l’URSS, à la stupeur générale[2], évènement perçu par Poutine comme étant « la plus grande catastrophe du XXème siècle »[3]. Jacques Attali, s’agissant de François Mitterrand, dit que : « c’était pour lui une formidable désillusion : il avait espéré en la survie de l’URSS comme en une structure d’avenir rassemblant les nations, à l’image de ce dont il rêvait pour la Communauté européenne »[4]. Le 8 décembre 1991, l’URSS est morte et la Communauté des États indépendants, douze au total, en prend la suite. Eltsine à la tête de la seule Russie, s’inscrit dans le prolongement de cette perestroïka en voulant construire cette « nouvelle Russie » :une puissance démocratique dotée d’une économie de marché, « civilisée » et « normale » dont les « vrais amis » sont les pays occidentaux. Pour Anne de Tinguy, cette politique pouvait réussir : « si le système soviétique n’était pas réformable, la Russie pouvait l’être ».

V. Poutine, personnage hors du commun, peut fasciner : ancien officier du KGB, rien ne semblait le destiner à devenir l’homme le plus puissant de la Russie. Et pourquoi a-t-il ce fort ressentiment vis-à-vis de l’Occident, dans sa partie anglo-saxonne, et même de l’Union européenne ? Ce livre dévoile les ressorts animant le Président russe qui a l’obsession majeure de redonner à la Russie son statut de grande puissance et les moyens par lesquels il espère aboutir : y figurent l’outil militaire et la contrainte intérieure. L’implosion de l’URSS dans laquelle la Russie avait une position majeure, lui permet d’hériter « des attributs de puissance », notamment « son statut nucléaire » avec les armes les plus nombreuses du mondeet « son siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies ». Par sa situation et son histoire, la Russie est un géant doté du plus grand territoire de la planète pourvu d’énormes richesses naturelles et d’une population d’un niveau de formation assez élevé ; elle est un État-continent à cheval sur l’Europe et sur l’Asie ; elle est l’héritière d’un empire multiséculaire disposant d’une culture vaste étant, à la fois, un pays slave et orthodoxe, et également multiconfessionnel et multiethnique. Pour toutes ces raisons, de très nombreux Russes sont convaincus qu’elle est vouée à être un des Grands de ce monde. Pour Anne de Tanguy, la « carte mentale » de ses élites dirigeantes (notion qu’elle a reprise d’Alan Henrikson)[5] en relève la trace tout en irrigant toutes les couches de la société. Dotée d’une « boite à outils richement pourvue », mise en exergue par l’auteure, la Russie aurait pu être promue au rang des plus grands pays développés. Cet ensemble, auquel s’ajoute la notion subjective de « derjavnost »[6], alimente la Russie dans son rapport au monde et aujourd’hui « semble soutenir le projet porté par les dirigeants du pays ». En effet, au fil du temps, la voie vers la grandeur n’est plus perçue comme pouvant être le fruit de l’ancrage de la Russie au monde occidental, mais résidant dans sa capacité à s’affirmer sur la scène internationale. Ce regard conduit, sur le plan interne, au durcissement du régime politique et, sur le plan externe, à accorder une place centrale aux apparences : pour être reconnue comme un acteur majeur, il faut faire comme si on l’est déjà, en attachant une importance aux gains immédiats, même symboliques. Est privilégié ce qui permet de compter parmi les « Grands ». La capacité de nuisance fait partie des grands moyens mis en œuvre pour y parvenir. Faisant partie des BRICS[7] et fort de son partenariat stratégique avec la Chine, elle est un acteur incontournable dans de nombreux espaces, en Europe, en Afrique, en Amérique latine, et au Moyen-Orient, comme en Syrie.

La Russie ne tolère pas de ne pas être traitée comme un égal par les grandes puissances de la planète. Jacques Chirac l’a bien compris : ne pas le reconnaître « serait une erreur majeure ». La politique poutinienne est le fruit de ce projet de grandeur et la place du pays dans la vie internationale guide les priorités. A la fin des années 1980, Soviétiques et Américains avaient drastiquement réduit leurs arsenaux nucléaires, Gorbatchev avait refusé d’avoir recours à la force en Europe de l’Est et des spécialistes en géopolitique croyaient à la « fin de l’histoire »[8]. Tel n’est plus le cas. L’invasion de l’Ukraine referme cette page historique d’une trentaine d’années et s’inscrit dans la politique néo-impériale de la Russie, dominée par l’idée que la souveraineté́ de l’Ukraine « n’est possible que dans un partenariat avec la Russie » (V. Poutine, juillet 2021). L’ambivalence pour la Russie est qu’elle reste, malgré les efforts entrepris, ce que Georges Sokoloff a appelé une « puissance pauvre ». Ce handicap fait que Poutine s’est engagé « dans une guerre dévastatrice », certes pour l’Ukraine, mais aussi pour la Russie elle-même, qui se trouve maintenant « à la croisée des chemins ». On s’interroge avec l’auteure : que sera demain la Russie ? « Un État dynamique qui donne la priorité au développement interne ou une puissance en déclin empêtrée dans ses vulnérabilités économiques, démographiques et politiques, aveuglée par la conviction qu’elle est vouée à être un Grand, mais incapable de se donner les moyens de l’être ? » Une des conséquences, et non des moindres, en prenant l’exemple du plan culturel, est l’implosion de l’orthodoxie.

On lira avec intérêt deux livres dont les auteurs sont cités dans l’immense bibliographie établie par Anne de Tinguy. Celui de Georges Sokoloff montre bien la priorité accordée au secteur militaire en URSS : « la nature militaire de l’empire soviétique était gravée au plus profond des structures industrielles, des espaces habités, des comportements et des mœurs de sa métropole russe »[9], et la difficulté des occidentaux à comprendre V. Poutine lorsqu’il est arrivé au pouvoir : pour Georges W. Bush, il suffit de « plonger dans le regard » de Poutine pour « entrevoir son âme » ; Hubert Védrine a vu en lui « un patriote, animé d’une grande idée de son pays » ; Tony Blair parle d’un homme d’État « hautement intelligent, avec une vue claire de ce qu’il veut pour la Russie »[10] Le livre de Laure Mandeville, – nous sommes en 2008 -, mérite aussi l’attention. Pour cette auteure, le destin de la Russie pourrait tenir en deux termes « troisième Occident » : « Il apparaît évident, pour notre intérêt et pour celui de la Russie, que cette dernière a vocation naturelle à rejoindre la communauté occidentale ».[11] Elle nous rappelle aussi que le « 8 août 2008, Vladimir Poutine lance ses chars contre la Géorgie sous les yeux de l’Occident stupéfait. » [12]La plupart des pays occidentaux sont, à nouveau, « étonnés », un peu plus de treize années plus tard, au début de l’année 2022, lorsque survient le début des hostilités en Ukraine.

D’aucuns précisent que le réveil des Ukrainiens, en tant que nation, résulte moins d’une opposition à la Russie, mais plutôt d’une volonté commune d’être gouvernés par des élites élues démocratiquement, comme c’est le cas pour les citoyens des États, membres de l’Union européenne, considérés comme un modèle. Pour conclure, Anne de Tinguy démontre qu’une « autre politique est possible pour la Russie » qui a « entre ses mains des atouts aussi nombreux que considérables », lui permettant de « prendre la place qu’elle souhaite avoir dans le monde ». L’élan vers une démocratie de type « occidental » suppose la mise au point d’un modèle socio-économique susceptible d’inverser le sens actuel de l’histoire vers des régimes plus ou moins autoritaires, afin de fédérer les peuples, épris de liberté et d’égalité, vers un avenir meilleur.


[1] C’est le 19 juin 1985 que pour la première fois, Mikhaïl Gorbatchev utilise ce mot qui signifie « reconstruction » et « retructuration ».

[2] Manuel Valls, dans son livre « Pouvoir », Stock, 2010 en fait état : « Comme la majorité des ‘’soviétologues’’ occidentaux, nous pensions que l’URSS finirait par rétablir son autorité sur ses pays satellites. »

[3] Mots prononcés en 2005 et rapportés par de très nombreux auteurs.

[4] Jacques Attali, C’était François Mitterrand, Fayard, 2005, p. 352

[5] Pour Alan Henrikson, la carte mentale est « une structure de l’esprit par laquelle une personne acquiert, organise et stocke des représentations du monde qu’elle mobilise pour son action ».  

[6] Terme russe issu de « derjava » signifiant la puissance ; il recouvre l’idée que par son histoire, sa culture, son potentiel économique et le talent de son peuple, la Russie était, est et sera un grand pays.

[7] Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du sud

[8] C’est le cas notamment de Francis Fukuyama

[9] Georges Sokoloff, Métamorphise de la Russie, 1984-2004, Fayard, 2003, p. 21

[10] Georges Sokoloff, ouvrage précité, p. 567

[11] Laure Mandeville, La reconquête russe, Grasset, 2008, p. 362

[12] Laure Mandeville, ouvrage précité, p. 43


 Jean-Dominique Giuliani, Européen. Sans complexes,

éd. Marie B, Paris 2022

L’Europe est notre ambition et notre fierté, mais aussi notre réalité et notre quotidien, celui que les Européens interrogent parfois avec timidité, parfois avec volontarisme. Parler de l’Europe sans complexes, en regardant la réalité en face au moment de la crise ou dans la perspective des campagnes électorales, en France ou dans d’autres États membres, tel est l’objectif que se donne Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman, un Européen fier de l’être et un auteur bien connu du public européen. Avec une dose d’humour, un sérieux d’analyse, une plume captivante, l’auteur aborde un panorama de sujets variés : la France entre l’ambition et la frustration, l’idée de l’Europe, sa souveraineté, sa place dans le monde, ses relations avec des alliés, des adversaires ou des ennemis. L’Allemagne, qui est avec la France aux origines du projet européen, n’est pas toujours comprise avec toute la finesse de son esprit, de son histoire. Or, les deux alliés peuvent avancer ensemble avec plus de connaissance mutuelle et pour inventer une Europe innovante et soudée. L’Europe de la mer, un sujet cher à Jean Dominique Giuliani, y trouve sa place.

Les constats, parfois tristes et sans cacher la déception, ouvrent tout de même la porte vers des ambitions européennes sans oublier la place de la France dans notre Union en progression. Nos divisions intra-européennes s’inscrivent dans l’histoire, parfois lourde à porter et marquée par Postdam ou Yalta, le mur de Berlin, mais aussi glorieuse, celle du Moyen-Âge ou de la Renaissance. Enfin, quel est le regard d’aujourd’hui porté sur la guerre, celle que nous avons rejetée au profit de la communauté qui aspire à la paix et au respect du droit, de la règle commune, alors que celle-là frappe à nos portes ? Le monde évolue à toute vitesse et l’Union ne peut faire l’économie de s’adapter. Pour cela, Jean-Dominique Giuliani propose trois concepts qui pourraient incarner l’innovation : la délégation, la simplification et la communication.  Est-ce que l’Union, souvent critiquée pour sa lenteur et sa rigidité, pourrait répondre à ce défi ? Est-ce que l’Europe pourrait dépasser ses divisions et avancer dans une vision commune des vingt-sept ? Et, quel rôle pourrait y entreprendre notre « Grande Nation » en fédérant et « sans complexes » ? En somme, l’unité européenne inquiète nos adversaires voire nos ennemis, mais c’est le seul chemin de l’Europe sans complexes.